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vendredi

Les belles manières - Fishbach, Maud Octallinn, Fantome, Juliette Armanet (Trois Couleurs)



Fishbach, Juliette Armanet, Maud Octallinn, Fantôme : les premiers albums de ces artistes semblent révéler une tendance « maniériste » dans la chanson française actuelle, surtout féminine. On n’entendra pas ce maniérisme comme un défaut, mais un goût affirmé pour le détail, l’interprétation, l’expressivité, la performance vocale. Ces musiciennes, aux sources d’inspiration 80’s assumées (Mylène Farmer, Isabelle Adjani, Desireless, Véronique Sanson) s’éloignent ainsi du naturalisme pour amplifier les expressions et déformer la réalité, vers l’outrance et une singulière folie, douce, dure, ou tendre. Sur « À ta merci »,  intense patchwork de synth-pop noire, Fishbach joue ainsi d’une palette de tons variée, brouillant les pistes entre ambivalence et jeu de rôles social : « Parfois, je joue la chanteuse plus que je ne suis chanteuse. Et selon la chanson, ce n’est pas la même personne qui parle. Ça peut n’être pas moi du tout, ou une jeune ingénue qui a juste envie de danser, ou l’incarnation de la mort, ou quelque chose de plus intemporel, voire même androgyne, asexué. ».

L’ambitus très large de Maud Octallinn lui permet aussi de construire ses mélodies sur plusieurs octaves : « Parfois, ça sonne grandiloquent ou tragicomique, mais c'est aussi une façon de faire co-exister plusieurs personnages/idées au sein d'une chanson ». Sur « En terrain tendre », exploration poétique et psychédélique d’un territoire intime (carte du tendre), autant que deuil vers une renaissance (« Enterre un tendre »), l’interprétation est au service d’une « vision dramatique de la musique qui m'aide à transmettre plus sincèrement mon message. ». C’est ce mélange de lyrisme et de mise à nu qui frappe aussi sur « Nabie », de Fantôme, entre la jeune Regina Spektor (piano et parquet réverbérés) et  Joanna Newsom (mélismes et harpe sacrée), quand Juliette Armanet, sur « Cavalier Seule », joue piano avec les genres (masculin/féminin, variété/indé) et les affects, entre nostalgie et humour noir, romantisme et fantaisie. Ces jeunes femmes ne s’excusent pas d’être là.


Fishbach - À ta merci (Entreprise)
Maud Octallinn – En terrain tendre (La Souterraine)
Fantôme – Nabie (Nuun Records)
Juliette Armanet – Cavalier Seule (EP – Barclay)

Article complet à lire dans Trois Couleurs # 147

lundi

Oneohtrix Point Never - Le jardin dans la corbeille


"Une part de ma technique de composition est anthropologique, archéologique. J’aime les déchets, j’aime ce qui est rejeté comme anachronique, obsolète, car je crois que ces choses n’auraient pas dû être abandonnées, qu’elles sont plus importantes, ou au moins aussi importantes que tout ce qui remplit les livres d’histoire. On peut les utiliser dans une nouvelle approche des formes. A la fin, tout revient pour moi à une forme. Il ne s’agit pas juste de regarder en arrière avec nostalgie, mais de chercher de nouvelles formes, sans être limité par aucune technique, car il n’y a aucune raison de l’être."

Huitième album de l’américain Daniel Lopatin, Garden of Delete sonne comme la synthèse (numérique, chaotique, quantique) de l’époque. De percussions MIDI en voix robotiques pitchées, de chorales synthétiques en arpeggiators saturés, « G.O.D. » est moins electronica nostalgique que pop formaliste, maniériste, baroque, ancrée avant tout dans la matière sonore, rendue presque aussi concrète qu’un bloc de béton ou un pic à glace frappant un zinc. De manière viscérale, organique, anxieuse, ce « jardin des effacés » (salon des refusés, art dégénéré ?) semble vouloir sortir de l’oubli et de l’évaporation les déchets et résidus, autant sonores qu’idéels, que notre surconsommation culturelle produit à outrance, et à perte. Apocalyptique, ce « Garden of delete » révèle et sauve l’inouï (au sens d’inentendu) de l’ostracisme historique pour le transformer et le sublimer en fleur mutante, tournoyante comme une pensée, et lui donner une nouvelle vie, une nouvelle enfance. Rencontre avec le passionnant Daniel Lopatin : 

http://www.chronicart.com/musique/oneohtrix-point-never-le-jardin-dans-la-corbeille/

mardi

Le flâneur

 

Le flâneur parisien du XIXème siècle promenait spleen et idéal dans les passages parisiens. Baudelaire a été un tel flâneur poétisant la ville de son regard, guettant chocs et épiphanies. Walter Benjamin l’a raconté et théorisé. Ils sont toujours modernes. Promenons-nous avec eux.

mercredi

Panda Bear meets The Grim Reaper

 

There’s a big break in the album between “Come to your senses” and “Tropic of cancer” (my favorite on this album). Is the middle of the album also the moment of the meeting with “the grim reaper”? The both sides are quite different (one very urban-tensed, frenetic, the other more contemplative, like in a dark water). You conceptualized these two parts?

Noah Lennox : The middle of the album is definitely meant as the crux and the transitional point. I was hoping that "Tropic of Cancer" and "Lonely Wanderer" would represent the area in between the old identity and the new one. As far as i’ve seen, it’s a cold and barren place. The conceptualization came after the fact. Once we had finished all the songs it was easier to try and find the story that the sequence might tell. I guess I’m trying to say I didn’t go into making the album thinking it would turn out this way. But looking at the thing now I do feel like the first part of the album represents an identity becoming disassembled to the point of psychosis. Then the latter third of the album is the reassembly.
Interview-portrait dans le dernier Trois Couleurs, consultable ici : 

mardi

Jean-Louis Murat





Jean-Louis Murat revient avec un double album, Babel, enregistré dans sa région, l’Auvergne, avec des musiciens locaux (le Delano Orchestra, de Clermont-Ferrand), et explore comme jamais son territoire, entre panthéisme et herborisation, idéal édénique et nostalgie d’un paradis perdu. Extrait de l'interview réalisée avec Tom Gagnaire pour Chro #10 : 

vendredi

Baxter Dury


Plus aéré et entraînant encore que son prédécesseur, It’s a pleasure renouvelle les contrepoints mélodiques entre le bad lad et la pretty girl (ici la française Fabienne Debarre), soutenu par des rythmiques electro-pop minimales, basses, claviers et guitares mixés à leur juste et distincte place (par le collaborateur des Arctic Monkeys, Craig Silvey). Entre spoken words cockney et promenades enlevées dans les méandres de son cerveau, entrain et mélancolie incarnent chez Dury les deux faces du même autoportrait, et l'on sent toujours chez lui la volonté d'en découdre avec un passé qu'il balance par-dessus bord comme une plaisanterie graveleuse. Les filles, toujours les filles…   

J’aime beaucoup la manière dont ta voix et celle de ta chanteuse, Fabienne Debarre, se mélangent, se répondent, comme des contrepoints.

C’est un « truc » mélodique, très simplement : je ne peux pas chanter les refrains, parce qu’ils sont trop hauts en termes de tonalité, alors j’utilise une voix féminine, dans la tradition de Gainsbourg, pour « décorer » la musique mélodiquement. Ce n’est pas réfléchi, conceptualisé ou théâtralisé, ni une juxtaposition symbiotique entre le masculin et le féminin ou je ne sais quoi, mais juste la structure mélodique des chansons qui commande ça, et le fait que je ne puisse pas chanter les refrains. Enfin, j’aime le son de la voix féminine, comme un instrument. La guitare peut être trop invasive, les claviers trop clichés ou prétentieux, la voix féminine est juste… je ne sais pas… plus jolie. Et elle agit bien en opposition avec ma voix, qui est plus « fucked-up ». C’est un schéma assez classique finalement : le gars en colère et la jolie chose… Qui ne s’opposent pas forcément d’ailleurs, mais comme faisant partie de la même bande, un peu comme Bonnie & Clyde.


Extrait de l'interview parue dans Chro #9